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isolées, on disait même payées, pour une rébellion à réprimer, et pour ruer une armée sur une population sans défense. On avait des faits, on voulait les dire, et, selon moi, la véritable cause était là. On était assez fort pour plaider la cause du peuple trahi et mutilé, on ne l’était pas assez pour proclamer celle du genre humain affranchi.

J’étais donc dans les idées de M. Jules Favre, qui se trouvait posé dans les conciliabules en adversaire d’Éverard, et qui était un adversaire digne de lui. Je ne connaissais pas Jules Favre, je ne l’avais jamais vu, jamais entendu ; mais lorsque Éverard, après avoir combattu ses argumens avec véhémence, venait me les rapporter, je leur donnais raison. Éverard sentait bien que ce n’était pas par envie de le contredire et de l’irriter ; mais il en était affligé, et devinant bien que je redoutais l’exposé public de ses utopies, il s’écriait : « Ah ! maudits soient le pont des Saints-Pères et la question sociale ! »