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Je savais bien que mes amis n’auraient aucune autorité sur mes enfans tant qu’ils seraient enfans. Mais ils pouvaient, au sortir de ce premier âge, exercer sur eux de douces influences. J’espérais même que Mme Decerfz pourrait être une véritable mère pour ma fille, et je voulais vendre ma propriété littéraire pour lui créer une petite rente qui la mît à même de faire son éducation, dans le cas où mon mari viendrait à y consentir. À l’époque du mariage de ma fille, cette rente lui eût été restituée : c’était alors peu de chose, mais cela représentait ce que coûte, dans la meilleure position possible l’éducation d’une jeune fille. Je partis donc pour Nohant avec le projet de tenter cet arrangement, qui ne devait avoir lieu que dans l’éventualité de ma mort, et pour entretenir, dans tous les cas, mes amis du devoir que je leur léguais d’entourer Maurice et Solange d’un réseau de sollicitudes paternelles et de relations assidues.

Mais avant de raconter ce qui suivit, je ne veux pas oublier une circonstance singulière qui eut lieu dans l’hiver de 1835.

J’avais en Berry une amie charmante, une nouvelle amie, il est vrai, Mme Rozane B., femme d’un fonctionnaire établi à La Châtre depuis quelques années seulement. C’était une personne distinguée à tous égards, d’une beauté exquise, et d’un caractère si parfaitement aimable qu’elle fut bientôt parmi nous comme si elle y était née.