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affectez de vos chagrins extérieurs jusqu’à vous en créer d’imaginaires. Vos écrits prouvent que vous vous tournez contre vous-même, et que vous vous en prenez à votre propre organisation, à votre propre destinée, d’une rencontre de circonstances fâcheuses, il est vrai, mais non pas tellement exceptionnelles que votre volonté ne puisse les surmonter ou les faire fléchir. Un moment viendra où vous le pourrez ; mais auparavant il vous faut recouvrer la santé morale et physique, que vous êtes en train de perdre. Il faut vous éloigner du spectacle et des causes de vos souffrances. Il faut sortir de ce cercle d’ennuis et de déboires. Allez-vous-en faire de la poésie dans quelque beau pays où vous ne connaîtrez personne. Vous aimez la solitude, vous en serez toujours privée ici : ne vous flattez pas de vivre en ermite dans votre mansarde. On vous y assiégera toujours. La solitude est mauvaise à la longue ; mais par momens elle est nécessaire. Vous êtes dans un de ces momens-là. Obéissez à l’instinct qui vous y pousse ; fuyez ! Je vous connais, vous n’aurez pas plus tôt rêvé seule quelques jours que vous reviendrez croyante, et quand vous en serez là, je réponds de vous. »

Planet a toujours été pour ses amis un excellent médecin moral, persuasif par l’attention avec laquelle il pesait ses conseils et celle qu’il portait à comprendre votre véritable situation.