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tiraillée on le voit ; mais la prévention n’y regarde pas de si près. Cela donna lieu à une petite campagne de feuilletons contre moi. Voici l’occasion d’en faire une bien plus brillante, car je dis encore que Planche est un des critiques les plus sérieux de ce temps-ci, le plus sérieux, hélas, si l’on applique ce mot à l’absence totale de bonheur et d’enjouement ! car il est facile de voir, à ses écrits qu’il n’a pas encore trouvé en ce monde le plus petit mot pour rire.

S’il y a de sa faute dans ce continuel déplaisir, n’oublions pas que nous disons souvent d’un malade qui s’aigrit et se décourage : C’est sa faute ! — Et qu’en disant cela, nous sommes assez cruels sans y prendre garde. Quand la maladie nous empoigne, nous sommes plus indulgens pour nous-mêmes et nous trouvons légitime de crier et de nous plaindre. Eh bien ! il y a des intelligences fatalement souffrantes d’un certain rêve qu’elles nous paraissent s’obstiner à caresser au détriment de tout le reste. Que ce rêve s’applique aux arts ou aux sciences, au passé ou au présent, il n’en est pas moins une idée fixe produite par une faculté idéaliste prononcée, et, dans l’impossibilité où cette faculté se trouve de transiger avec elle-même, il n’y a pas de prise pour les conseils et les reproches du dehors.

Un autre caractère mélancolique, un autre esprit éminent était Charles Didier. Il fut un de mes meilleurs amis, et nous nous sommes