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douce éloquence pour me consoler, mais il n’y parvint pas, il y avait trop de tolérance dans sa doctrine pour une âme aussi avide de croyance absolue que l’était la mienne. Cette croyance m’échappait ; je ne sais qui eût pu me la rendre, mais, à coup sûr, ce n’était pas lui. Il était trop compatissant à la souffrance du doute. Il la comprenait trop bien peut-être. Il était trop intelligent ou trop humain. Il me conseilla d’aller passer quelques jours dans mon couvent. Il en demanda pour moi la permission à la supérieure Mme Eugénie. Je demandai la même permission à mon mari, et j’entrai en retraite aux Anglaises.

Mon mari n’était nullement religieux, mais il trouvait fort bon que je le fusse. Je ne lui parlais pas de mes combats intérieurs à l’endroit de la foi : il n’eût rien compris à un genre d’angoisse qu’il n’avait jamais éprouvée.

Je fus reçue dans mon couvent avec des tendresses infinies, et comme j’étais réellement souffrante, on m’y entoura de soins maternels ; ce n’était pas là peut-être ce qu’il m’eût fallu pour me rattacher à ma vie nouvelle. Toute cette bonté suave, toutes ces délicates sollicitudes me rappelaient un bonheur dont la privation m’avait été si longtemps insupportable, et me faisaient paraître le présent vide, l’avenir effrayant. J’errais dans les cloîtres avec un cœur navré et tremblant. Je me demandais si je n’avais pas résisté à ma vocation, à mes instincts, à ma