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sa tombe, et ces voix-là seront le meilleur poids dans la balance où l’opinion pèse d’une main distraite le bien et le mal. Ces voix-là, ce sont les voix d’amis qui l’ont connue longtemps et qui ont recueilli et apprécié tous les secrets de son intimité : ce sont les voix de la famille. Elles prévaudront contre celles des gens qui voient de loin et jugent au hasard.

Paris, décembre 49.

« Chère madame Sand, j’ai vu hier votre pièce du Champi. Jamais, depuis que je suis au théâtre, je n’ai éprouvé une telle émotion ! Ah ! ce garçon dévoué, gardien fidèle de l’existence de la pauvre persécutée ! Heureux fils qui sauve sa Madeleine ! Tous n’ont pas ce bonheur-là ! Comme j’ai pleuré ! Blotti au fond de ma loge, le mouchoir aux dents, j’ai cru étouffer !

« Ah ! c’est que, pour moi, ce n’était plus François et Madeleine : c’était elle et moi ! ce n’était pas un homme et une femme qui peuvent ou doivent finir par un mariage ; ce n’était même pas un fils et une mère ; c’était deux âmes qui avaient besoin l’une de l’autre. Ah ! j’ai vu passer là les dix belles années de ma vie, mon dévouement, mon espérance, mon but, mon soutien, tout ! Oh ! j’ai été trop heureux pendant dix ans, il fallait payer cela !

« Chère madame Sand, pardonnez-moi toutes ces larmes au sujet d’un succès qui réjouit tous