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sur son petit tombeau. Me voit-il ? Le crois-tu ? Je ne sais plus que faire de ma vie, je ne connais plus mon devoir. Je voudrais et je ne peux plus aimer mes autres enfans. — J’ai cherché des consolations dans les livres de prières. Je n’y ai rien trouvé qui me parle de ma situation et des enfans que nous perdons. Il faudrait remercier Dieu d’un aussi affreux malheur ! — Non, je ne le peux pas ! Jésus lui-même n’a-t-il pas crié :

« Mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? »

Si cette grande âme a douté, que devenir, nous autres pauvres créatures ? Ah ! ma chère, que je suis malheureuse ! c’était tout mon bonheur. — Je croyais que c’était ma récompense pour avoir été bonne fille, et bien dévouée toujours à toute une famille dont la charge était bien chère ! — mais aussi bien lourde à mes pauvres épaules… j’étais si heureuse ! Je n’enviais rien à personne. Je luttais avec courage dans une profession haïssable, que je remplissais de mon mieux, et quand la maladie ne m’arrêtait pas, dans l’idée de rendre tout mon monde plus heureux autour de moi. Les révolutions…… l’art perdu…… nous étions encore heureux. — Nos pauvres petits faisaient des barricades, chantaient la Marseillaise, les bruits de la rue redoublaient leur gaîté ! Eh bien ! quelques jours après ces mêmes bruits redoublaient les convulsions de mon pauvre Georges. Il a eu quatorze jours d’agonie. Quatorze jours nous avons été sur la