Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 10a13 1855 Gerhard.djvu/241

Cette page n’a pas encore été corrigée

colline, les êtres humains sont plus tranquilles et plus satisfaits que lui.

C’est la loi de la vie ; mais, de toutes les lois de la vie, c’est la plus cruelle ; et quand ce devient une loi de la conscience, c’est le tourment du devoir de tous aux prises avec l’impuissance de chacun.

Ceci n’est pas une récrimination politique. La politique d’actualité, si intéressante qu’elle puisse être, n’est jamais qu’un horizon. La loi de douleur qui plane sur notre monde et le cri de plainte qui s’en exhale partent des intimes convulsions de son essence même, et nulle révolution actuellement possible ne saurait ni l’étouffer ni en détruire les causes profondes. Quand on s’abîme dans cette recherche, on arrive à constater l’action du bien et du mal dans l’humanité, à saisir le mécanisme des effets et des résistances, à savoir enfin comment s’opère cet éternel combat. Rien de plus ! Le pourquoi, c’est Dieu seul qui pourrait nous le dire, lui qui a fait l’homme si lentement progressif, et qui eût pu le faire si intelligent et plus puissant pour le bien que pour le mal.

Devant cette question que l’âme peut adresser à la suprême sagesse, j’avoue que le terrible mutisme de la divinité consterne l’entendement. Là, nous sentons notre volonté se briser contre la porte d’airain des impénétrables mystères : car nous ne pouvons pas admettre le souverain bien,