Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 10a13 1855 Gerhard.djvu/206

Cette page n’a pas encore été corrigée

tout. Je me souviendrai toujours de mes efforts pour pleurer tout bas comme d’une des plus abominables angoisses de ma vie.

Maurice ne se rendit qu’à la crainte d’augmenter un chagrin que je ne pouvais pas lui cacher ; mais son parti n’était pris qu’à moitié. Ses jours de sortie amenaient de nouvelles crises. Il arrivait le matin, gai, bruyant, enivré de sa liberté. Je passais une grande heure à le laver et à le peigner, car la malpropreté qu’il apportait du collége était fabuleuse. Il ne tenait pas à se promener ; toute sa joie était de rester avec sa sœur et moi dans mes petites chambres, de barbouiller des bons hommes sur du papier, de regarder ou de découper des images. Jamais enfant, et plus tard jamais homme, n’a si bien su s’occuper et s’amuser d’un travail sédentaire. Mais, à chaque instant, il regardait la pendule, disant : Je n’ai plus que tant d’heures à passer avec toi. Sa figure s’allongeait à mesure que le temps s’écoulait. Quand venait le dîner, au lieu de manger, il commençait à pleurer, et quand l’heure de rentrer avait sonné, le déluge était tel, que souvent j’étais forcée d’écrire qu’il était malade, et c’était la vérité. L’enfance ne sait pas lutter contre le chagrin, et celui de Maurice était une véritable nostalgie.

Quand on le prépara à sa première communion, qui était affaire de réglement au collége, je vis qu’il acceptait très naïvement l’enseignement