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ce jour-là. J’étais sur le balcon ; je voulus l’y attirer, parler d’autre chose, il n’y eut pas moyen, il voulait lire, il lisait, et à chaque page il s’écriait :

« Allons ! c’est un pastiche ; école de Balzac ! Pastiche, que me veux-tu ! Balzac, que me veux-tu ? »

Il vint sur le balcon, le volume à la main, et me critiquant mot par mot, me démontrant par a plus b que j’avais copié la manière de Balzac, et qu’à cela je n’avais gagné que de n’être ni Balzac ni moi-même.

Je n’avais ni cherché ni évité cette imitation de manière, et il ne me semblait pas que le reproche fût fondé. J’attendis, pour me condamner moi-même, que mon juge, qui emportait son exemplaire, l’eût feuilleté en entier. Le lendemain matin, à mon réveil, je reçus ce billet : « George, je viens faire amende honorable ; je suis à vos genoux. Oubliez mes duretés d’hier soir, oubliez toutes les duretés que je vous ai dites depuis six mois. J’ai passé la nuit à vous lire. Ô mon enfant, que je suis content de vous ! »

Je croyais que tout mon succès se bornerait à ce billet paternel et ne m’attendais nullement au prompt retour de l’éditeur, qui me demandait Valentine. Les journaux parlèrent tous de M. G. Sand avec éloge, insinuant que la main d’une femme avait dû se glisser çà et là pour révéler à l’auteur certaines délicatesses du cœur