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III

M. Beyle (Stendhal). — La cathédrale d’Avignon. — Passage à Gênes, Pise et Florence. — Arrivée à Venise par l’Apennin, Bologne et Ferrare. — Alfred de Musset, Géraldy, Léopold Robert à Venise. — Travail et solitude à Venise. — Détresse financière. — Beau trait d’un officier autrichien. — Catulle père. — Vexation. — Polichinelle. — Rencontre singulière. — Départ pour la France. — Le Carlone. — Les brigands. — Antonino. — Rencontre de trois Anglais. — Les théâtres à Venise. — La Pasta, Mercadante, Zacometto. — Les mœurs de l’égalité à Venise. — Arrivée à Paris. — Retour à Nohant. — Julie. — Mes amis du Berry. — Ceux de la mansarde. — Prosper Bressant. — Le Prince.


Sur le bateau à vapeur qui me conduisait de Lyon à Avignon, je rencontrai un des écrivains les plus remarquables de ce temps-ci, Beyle, dont le pseudonyme était Stendhal. Il était consul à Civila-Vecchia et retournait à son poste, après un court séjour à Paris. Il était brillant d’esprit et sa conversation rappelait celle de Delatouche, avec moins de délicatesse et de grâce, mais avec plus de profondeur. Au premier coup d’œil, c’était un peu aussi le même homme, gras et d’une physionomie très-fine sous un masque empâté. Mais Delatouche était embelli, à l’occasion, par sa mélancolie soudaine, et Beyle restait satirique et railleur à quelque moment qu’on le regardât. Je causai avec lui une partie de la journée, et le trouvai fort aimable. Il se moqua de mes illusions sur l’Italie, assurant que j’en aurais vite assez, et que les artistes à la recherche du beau en ce pays étaient de véritables badauds. Je ne le crus guère, voyant qu’il était las de son exil et y retour-