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HISTOIRE DE MA VIE 65

avait là des dames que je ne te nommerai point et qui étaient de force, comme madame de la ***, à dire une épître à rame pour une épithalame.

11 paraît que j'ai fait une faute d'orthographe dans ma dernière lettre, et que Deschartres en jette les hauts cris. Eh bien, dis-lui de ma part effrontément que c'est lui qui se trompe ; que leur est un pronom démonstratif qui s'ac- corde en genre et en nombre avec le substantif, qu'on dit leur au masculin et leure au féminin ; que puisqu'on dit leurs chevaux, leurs soldats, on doit dire leures voitures, leures femmes, comme quand on parle des faits et gestes des maires de village, on dit leures balourdises, leures cuis- treries. Voilà bien du bruit pour une iaute d'inattenUon ! Eh bien, je veux soutenir que j'ai raison pour le mettre en fureur, et que si je n'ai pas raison, je lui coupe les oreilles.

Je quitte mes musiciens, qui avaient pris goût avec moi au Gluck, au Mozart, Haydn, etc. Nous reculons en terre ferme, nous retournons à notre camp de Montieuil, et je vais regretter le voisinage de la mer. Toi qui n'aimes pas mes voyages nautiques, tu t'en réjouis, bonne méchante mère.

LETTRE VI

Au Fayel, 17 germinal (avril 1804).

Nous sommes installés dans un castel qu'on décore pom- peusement du titre de château. C'est bien le séjour le plus triste qu'on puisse imaginer, à cinq lieues de Bou- logne, quatre de Montreuii et une d'Étaples ; on peut se croire dans le désert de Barca. L'horizon est borné au loin par la mer et par des dunes de sables d'où, lorsque le II. ^