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CQ HISTOIRE DE MA VIE

le pénèlrent. Mes yeux se remplissent de larmes, elles ma sufToquenl.; je ne sais si c'est de joie ou de douleur, mais à chaque expression de ton amour et de ta bonté, je pleure comme quand j'avais dix ans. ma bonne mère, mon t Acellente amie, comment te dire la douleur que m'ont causée ton chagrin et ton mécontentement? Ah! tu sais bien que l'intention de l'affliger ne peut jamais entrer dans mon âme, et que, de toutes les peines que je puisse éprouver, la plus amère est celle de faire couler tes larmes, Ta dernière lettre m'avait navré, celle d'aujourd'hui me rend la paix et le bonheur. J'y retrouve le langage, le cœur de ma bonne mère ; elle-même reconnaît que je ne suis pas un mauvais fils et que je ne méritais pas dotant souffrir. Je me réconcilie avec moi-même, car, quand tu me dis que je suis coupable, bien que ma conscience ne me reproche rien, je me persuade que tu ne peux pas le tromper, et je suis prêt à m'accuser de tous les crimes plutôt que de te contredire.

Je ne sais qui a pu te dire que je voulais me jeterà la mer. Je n'ai pas eu cette pensée. C'est pour le coup que j'aurais cru être criminel envers toi qui m'aimes tant. Si je me suis exposé plus d'une fois à périr dans les flots, c'est sans songer à ce que je faisais. Véritablement, je me déplaisais tant sur la terre que je me sentais plus à l'aise sur les vagues. Le bruit du vent, les secousses violentes de la barque s'accordaient mieux que tout avec ce qui se passait au dedans de moi, et au milieu de cette agitation je me trouvais comme dans mon élément.

Il est vrai que dernièrement j'ai failli rendre tout notre quartier général victime de mon goût pour la navigation, mais on t'a beaucoup exagéré les choses. J'avais été à bord d'un pêcheur, et je fis pendant le déjeuner un si beau récit de la pêche aux harengs que Dupont fut tenté de faire une promenade de ce genre. Quoique le vent fût