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HISTOIRE DE MA VIE -59

jours avec un appétit féroce. Quand nous ne sommes pas' en mer, nous travaillons à la construction de notre bara- que. Cet exercice est bien nécessaire pour arriver à dormir sur le peu de paille que nous avons. Dcrnièr.nnent nous allâmes déjeuner chez un général de nos amis, de l'iuitre côté du cap Grincz. Nous partîmes à cheval à marée basse, en suivant la laisse de la mer en bas des falaises. Nous voulûmes revenir à six heures du suir par le même che- min, et comme la marée montait, nous nous trouvâmes coupés par les flots en beaucoup d'endroils. Dupont, qui va toujours comme un hanneton, se jeta dans un trou avec son cheval et pensa se noyer. Bonaparte, le jour de son départ de Boulogne, en a fait autant dans le port; il vou- lait passer de même à la marée haute; son petit cheval arabe s'embarrassa dans des amarres de chaloupe, et Bunaparle tomba dans l'eau jusqu'au menton. Toute sa suite te précipita pour le secourir, mais il remonta leste- ment à cheval et fut se sécher dans sa baraque. Cet évé- nement n'est pjs dans le Moniteur.

.... Je .souhaite au maire vent arrière, marée haute, et joli frais. Toi, je t'aime, ma bonne mère, et je suis très- inquiet de ton silence. J'espère que tu ne me boudes pas, que tu ne recommences pas à m'accuser, à méconnaître l'amour et le respect que je te porte ; sois ccrtnine que je n'aime rien plus que toi sur la terre.

LETTRE m

Au camp d'Ostrohow, 7 pluviôse an XII (janvier 180'i).

11 y a des moments de bonheur qui effacent toutes les peines! Je viens de recevoir ta lettre du 26. Ah! ma bonne mère, mon cœur ne peut suffire à tous les sentiments qui