Page:Sand - Histoire de ma vie - tome 2.djvu/54

Cette page n’a pas encore été corrigée

U HISTOIRE DE MA VIE

A ce début, Lebrun prit un maintien grave pour recevoir ce digne oncle qu'il cherchait des yeux. Je réussis alors à m'avancer pour faire ma révérence. 11 était si stupéfait qu'il songeait à peine à me la rendre. Enfin, après m'avoir regardé avec attention, il nous partit au nez d'un grand éclat de rire en nous demandant lequel de nous élait l'on- cle ou le neveu. Il eut beaucoup de peine à se persuader que j'étais le plus âgé, et il fut très-aimable dans sa gaieté. De là nous fûmes chez Cambacérès, oii c'était à mon tour de présenter Auguste comme mon neveu, et la même scène recommença. Cambacérès m'a invité à dîner pour jeudi. Je n'aurai garde d'y manquer, car ses dîners ont une grande réputation de gueule. J'ai revu hier Georges Lafayetle, qui m'a présenté à sa femme, mademoiselle de Tracy. Il arrive d'Italie. J'ai revu aussi madame de Simiane, sœur de M. de Damas, avec lequel j'ai été en relation à Rome, et j'ai fait sa conquête en lui parlant de son frère.

Quand celte éternelle réponse du premier consul m'ar- rivera, et maintenant c'est bientôt, j'espère, je pars au triple galop pour aller t'embrasser et pour te dire que je t'aime cent fois plus que tu ne crois.

28 ventôse (mars 1803).

Je vois souvent mon ami Heckel. Comme il demeure fort loin, nous faisons chacun la moitié du chemin ; nous nous joignons aux Tuileries, et là nous arpentons tout le jardin en babillant et en raisonnant à perte de vue. C'est vrai- ment l'homme le plus instruit et le plus éloquent que j'aie jamais rencontré, et il a des sentiments si nobles, que je me sens toujours meilleur quand je le quitte que quand je l'aborde. Il sollicite en ce moment une place de provi-