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32 HISTOIRE DE MA VIE

souvent des châteaux en Espagne. Dupont va aller à Paris au mois de janvier : aussitôt je filerai vers Nohant, et, en pas- sant à Paris je tâcherai de faire encore quelques démarches pour sortir du poste oîi je suis et où je me déplais chaque jour davantage. Je rabâche, mais je ne puis assez te dire que la guerre ennoblit tout. En temps de paix, un aide de camp est un pauvre sire, surtout quand il a affaire à un cerveau détraqué. Je voudrais passer capitaine et aller au régiment, ou entrer au moins dans la garde du consul, parce que là, en temps de guerre, il y a du beau et du grand à tenter

24 brumaire.

J'ai tué hier un loup dans la forêt de Lannoy. Ils sont si nombreux que sans nous ils feraient de grands ravages dans le pays. Je ne sais pas si celui que j'ai abattu est le même qui avait mordu quinze personnes ces jours-ci. Je le voudrais bien. Au reste, nous en avons tué huit, et sans doute il était du nombre. Ils vont en troupe et la chasse devient un peu plus sérieuse, c'est-à-dire plus amusante.

Apparemment l'itinéraire de Bonaparte fut changé, puis- que mon père eut la liberté de s'absenter. On voit bien qu'il s'ennuyait loin de Victoire, et fit tout au monde pour aller la voir à Paris. Pour cela il lui fallut prétexter des affaires, et il eut besoin d'une lettre de sa nière au géné- ral Dupont. Car Dupont était « plus braque et pkis mal » disposé que jamais. Monsieur fait la cour à une dame « dont le mari était absent, mais depuis huit jours ce » mari a eu l'impolitesse de revenir, et le général, contrarié » dans ses amours, s'en prend à nous, qui n'y pouvons