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392 HISTOIRE DE MA VIE

que pour celui de Léonce. Mais que ce fût Léonce ou Sep- "time, j'avais une grande terreur de l'une ou de l'autre union, parce que, depuis la mort de mon père, leurs parents ne voyaient point ma mère et la maltraitaient beaucoup dans leur opinion.

Je pensais donc que mon mariage serait le signal d'une rupture forcée avec ma mère, ma sœur et ma chère Clolilde, et j'étais dès lors si soumise de fait à ma grand'mère, que l'idée de résister à sa volonté ne se présentait pas encore à mon esprit. J'étais donc toujours assez mal à l'aise avec tous les Villeneuve, quoique d'ailleurs je les aimasse beaucoup ; et quelquefois, en jouant chez eux avec leurs enfants, il me venait des envies de pleurer au milieu de mes rires. Appréhensions chimériques, souffrances gratuites ! Personne ne pensait alors à me séparer de ma mère, et ces enfants, plus heureux que moi, ne songeaient guère à enchaîner leur liberté ou la mienne dans l'avenir.

La sœur de Septime, Emma de Villeneuve, aujourd'hui madame de la Roche-Aymon, était une charmante personne, gracieuse, douce et sensible, pour qui j'ai ressenti dès mon en- fance une sympathie particulière. J'étais à l'aise avec elle, et pour peu qu'elle eût deviné les idées qui me tourmen talent, je lui aurais ouvert mon cœur au moindre encou- ragement de sa part. Mais elle était bien loin de penser qu'après avoir ri sur ses genoux et gambadé autour d'elle, je m'en allais pleine de mélancolie et me reprochant en quelque sorte l'amitié que j'éprouvais pour mes parents paternels, pour ceux que l'on m'avait présentés comme les ennemis de ma mère.

La mère d'Emma et de Septime, madame René de Vil- leneuve, était une des plus jolies femmes de la cour im- périale. Elle était à cette époque dame d'honneurdela reine llorlense. Je la voyais quelquefois le soir avec ries robes H queue et des diadèmes h l'antique, ce qui m'éblouissait