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HISTOIRE DE MA VIE 383

moi: mais, soit que Pauline fùl plus distraite, soil le grand désir qu'ont les mères de pousser leurs enfants à de rapides progrès, elle la brutalisait un peu, et lui pinçait même les oreilles d'une façon toute napoléonienne. Panline pburait et criait , mais la leçon arrivait à bonne fin, et, aussitôt après, madame de Pontcarré nous menait pro- mener et jouer chez sa mère, qui avait un appartement au rez-de-chaussée et un jardin, quelque part comme rue de la Ferme-des-Malhurins ou de la Victoire. Je m'y amusais beaucoup, parce que nous y trouvions souvent des en- fants plus âgés que nous, il est vrai, de quelques années, mais qui voulaient bien nous inviter à leur colin-maillard et à leur partie de barres. C'étaient les enfants de madame Debrosse, seconde fille, je crois, de madame de Fargès, par conséquent les cousins de Pauline. Je ne me rappelle du garçon que le nom d'Ernest ; la fille était déjà une assez grande personne relativement à nous. Mais elle était gaie, vive et fort spirituelle. Elle s'appelait Constance et était alors au couvent des Anglaises, où nous avons été depuis Pauline et moi. 11 y avait aussi un jeune garçon qui s'appelait Fernand de Prunelet, dont la figure était agréable malgré un énorme nez. 11 était le doyen de nos parties de jeu, par conséquent le plus obligeant et le plus tolérant à l'égard des bouderies ou des caprices de deux petites filles. Nous dînions quelquefois tous ensemble, et, après le dîner, on nous laissait nous évertuer dans la salle à manger, oîi nous faisions grand vacarme. Les domes- tiques et même les mamans venaient aussi se mêler aux jeux. C'étiit une sorte de vie de campagne transportée à Paris, et j'avais grand besoin de cela.

Je voyais aussi de temps en temps ma chère Clotilde, avec qui je me qucr>;llais beaucoup plus qu'avec Pauline, [ arce qu'elle répondait davantage à mon affection et ne l'renait pas mes torts avec la même insouciance. Elle se