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382 HISTOIRE DE MA VIE

près, le même âge que moi. Comme sa mère était une femme de beaucoup d'esprit, l'enfant n'était point maniéré. Cependant elle avait une meilleure tenue que moi, elle mar- chait plus légèrement et perdait beaucoup moins souvent ses ganîs et son n;ouchoir. Aussi ma grand'mère mêla pro- posait-elle pour modèle à toute heure, moyen infaillible pour me la faire détester si j'avais eu l'amoLir-propre qu'on voulait me donner et si je n'avais pas eu toute ma vie un besoin irrésistible de m'attacher aux êtres avec lesquels le hasard me fait vivre.

J'aimai donc tendrement Pauline, qui se laissa aimer. C'était là sa nature. Elle était bonne, sincère, aimable, mais froide. J'ignore si elle a changé. Cela m'étonnerail beaucoup.

Nous prenions toutes nos leçons ensemble, et ma grand'mère n'ayant guère le temps, à Paris, de s'occuper de moi dans le détail, madame de Pontcarré eut la bonté de m'assccier aux études de Pauline, comme on associait Pauline à mes leçons. Il vint chez nous pour nous deux, trois fois par semaine, un maître d'écriture, un maître de danse, une maîtresse de musique. Les autres jours, madame de Pont- carré venait me chercher, et c'était elle-même qui se donnait la peine de nous faire repasser les principes et de nous mettre les mains sur son piano. Elle était excellente musicienne et chantait avec beaucoup de feu et de gran- deur. Sa belle voix et les brillants accompagnements qu'elle trouvait sur un instrument moins aigre et plus étendu que le clavecin de Nohanl augmentèrent mon goût pour la nmsique. Après la musique, elle nous enseignait la géographie et un peu d'histoire. Pour tout cela elle se servait des méthodes de l'abbé Gaultier, qui était en vogue alors, et que je crois excellentes. C'était une sorte de jeu avec des boules et des jetons comme au loto, et on appre- nait en s'aumsanl. Elle était fort douce et encourageanlc avec