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HISTOIRE DE MA VIE 373

petits sacs de graines qu'il expérimentait dans le jardin, rêvant sans cesse au moyen d'acclimater quelque nouvelle plante fourragère, fromentale ou légumincuse dans le dé- partement, et se flattant d'éclipser la gloire de ses concur- rents au comité d'agriculture. Nous prenions soin de lui mêler toutes ces graines triées avec tant de scrupule par SCS propres mains. Nous mélangions le pastel avec le colza, et le sarrasin avec le millet. Si bien que les graines poussaient tout de travers et qu'il récoltait de la luzerne là oh il avait semé des raves. Il entassait manuscrits sur manuscrits pour prouver à ses confières de la Société d'agriculture que M. Cadet de Vaux était un âne et M. Rougier de la Bergerie un veau, car c'était en ces termes peu parlementaires qu'il faisait la guerre aux systèmes de ses concurrents dans la science agricole. Nous dérangions les feuillets de ses opuscules et nous ajoutions des lettres à plusieurs mots pour y faire des fautes d'or- thographe. Il lui arriva une fois d'envoyer le manuscrit ainsi embelli et dérangé à l'imprimerie, et quand on lui envoya ses épreuves à corriger, il entra dans une fureur épouvantable contre le crétin de prote qui faisait de pa- reilles bévues.

Parmi ses livres, il y en avait plusieurs qui excitaient vivement notre curiosité, entre autres le Grand Albert et le Petit Albert, et divers manuels d'économie rurale et domestique fort anciens et remplis de billevesées. Il y en avait un dont j'ai oublié îe titre, que Deschartres avait pincé au plus haut de ses rayons et qu'il prisait pour l'ancienneté de l'édition. Je ne saurais dire au juste de quoi il traite, ni ce qu'il vaut , nous ne pouvions guère le parcourir, car l'escalade pour le saisir et le remettre en place prenait une partie du temps que nous dérobions à la vigilance du maître. Autant que je na'en souviens, il y HVRït d« tout, de» remèdes pour guérir le» maladie» de»»