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HISTOIRE DE MA VIE 27

sous-inspecteur aux revues, trois capitaines du 16^, quatre chiens courants et huit fusils ; note bien tout ce matériel" Nous étions attelés de deux chevaux neufs. Nous confions les rênes au colonel comme au plus sage, et je me place avec lui sur le siège. Nous roulions fort agréablement depuis un quart d'heure, lorsque tout à coup nous arrivons à une descente de traverse rapide, longue et sillonnée de pro- fondes ornières; nous voulons retenir nos chevaux, qui, peu habitués à tirer, et surtout à sentir la voiture les pres- ser se mettent au galop, puis s'emportent tout à fait. Je joins mes efforts à ceux du colonel pour les arrêter, nous cassons les rênes; voyant alors qu'il n'y a plus d'espoir de salut et que nous allons tous être précipités dans la rivière qui coule au bas de la côte, je saute à terre pour gagner la tête des chevaux ; mais comme le terrain est fort inégal en cet endroit, je tombe, je me ramasse, mais au moment, oij je vais être sur pied, les chevaux appuient de mon côté, et la roue de derrière me passe sur la jambedepuis la che- ville jusqu'au genou. Je n'ai rien de cassé et j'en suis quitte pour une contusion etunc entaille. Le colonel a sauté un instant après moi et s'est démis un poignet. Les autres allaient sauter dans la rivière avec la calèche quand les clievaux se sont abattus tous les deux à la fois, et ont ter- miné ainsi leur effrayante galopade.

Mais ce qu'il y eut de plaisant, c'est, quand nous fûmes tous sur pied, de voir la figure di3 M***. La frayeur lui avait ùit tellement perdre la tête, qu'il ne savait plus ce qu'il disait et demandait qu'on le visitât pour savoir s'il n'é- tait pas blessé. Le fat est que la visite eût été désagréable, il avait sali ses chausbes. Tu penses bien que nous ne pûmes nous tenir de rire, ce qui nous fit oublier nos maux. Nous rentrâmes dans Châlons, les valides portant les blessés. Nous n'en sommes pas moins partis le surlendemain pour Charleviile, où nous sommes arrivés sans encombre. Ma