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HISTOIRE DE MA VIE 327

Cette famille demeurait alors, et a demeuré depuis pen- dant une trentaine d'années, dans une même maison, q{ji lui appartenait, rue de Grammont. C'était une nombreuse famille, comme on va voir, et dont l'union avait quelque chose de patriarcal. Au rez-de-chaussée, c'était madame de Courcelles, mère de madame deGuibert; au premier, madame de Guibert, mère de madame René de Ville- neuve, au deuxième, M. et madame René de Villeneuve avec leurs enfants. Dix ans après l'époque de ma v,3 que je raconte, mademoiselle de Villeneuve ayant épousé M. de la Roche-Aymon, demeura au troisième, et la vieille madame de Courcelles vivait encore sans défaillance et sans infirmités, lorsque les enfants de madame de la Roche-Aymon furent installés avec leurs bonnes au qua- trième étage, ce qui faisait en réalité, avec le rez-de- chaussée, cinq générations directes vivant sous le même toit, et madame de Courcelles pouvait dire à n)adame de Guibert ce mot proverbial si joli : Ma fille, va-Ven dire à ta fille, que la fille de sa fille crie.

Toutes ces femmes s'étant mariées très-jeunes et étant toutes jolies ou bien cons^ervées, il était impossible de deviner que madame de Villeneuve fût grand'mère et madame de Guibert arrière-grand'mère. Quant à la trisaïeule, elle était droite, mince, propre et active. Klle montait légèrement au quatrième pour aller voir les ar- rière-petits-enfants de sa fille. Il était impossible de ne pas éprouver un grand respect et une grande sympathie en la voyant si forte, si douce, si calme et si gracieuse. Elle n'avait aucun travers, aucun ridicule, aucune vanité. Elle est morte sans faire de maladie, d'une indisposition subite h laquelle son grand âge ne put rési.^ter. Elle était encore dans toute la plénitude de ses facultés.

Je ne dirai rien de madame de Guibert, veuve du géné- ral de ce nom, qui a eu des talents et du mérite ; je l'ai