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HISTOIRE DE MA VIE 135

pour escorter l'empereur. 11 est arrivé hier soir à Wurtzbourg. Nous sommes cantonnés aux environs. Toute la garde à pied est arrivée. Chemin faisant l'empereur m'a fait plu- sieurs questions sur le régiment, et à la dernière, que le bruit de la voiture m'empêchait d'entendre, et que pour- tant il répéta trois fois, je répondis à tout hasard : Oui, sire. Je le vis sourire, et je juge que j'aurai dit une fièrc liétise. S'il pouvait me donner ma retraite comme idiot ou sourd, je m'en consolerais bien en retournant près de toi !

Voici le froid qui arrive, et je regrette beaucoup de n'a- voir pas emporté ma pelisse; fais-moi le plaisir de la re- mettre à Chapotot, qui, d'une manière ou de l'autre me la fera passer. Ne mets pas cette recommandation en pa- pillottes; car entre ta pincette et tes jolis cheveux elle pour- rait avoir trop chaud, tandis que je gèlerais ici, loin de toi, dans mon caracot de singe.

Adieu, ma jolie femme, ma chère amie, ce que j'aime, ce que je regrette, ce que je dc'sire le plus au monde. Je t'em- brasse de toute mon âme, j'aime mon Aurore, nos enfants, ta sœur, tout ce qui est nous.

Nous avons une poste à notre division, ainsi j'ai l'espoir de recevoir souvent de tes nouvelles.

L'arrivée subite de Napoléon à Wurtzbourg changea les dispositions des chefs de l'armée prussienne. Ceux-ci, frap- pés par la nouvelle tactique qui avait si puissannnent con- tribué aux succès rapides de la précédente campagne con- tre les Autrichiens et les Russes, au lieu de garder la défensive en (■hoisis>ai)t les terrains les plus favorables et eu laissant l'armée française venir jusqu'à eux à travers toutes les difficultés d'une marche en pays ennemi, avaient