Page:Sand - Francia.djvu/13

Cette page n’a pas encore été corrigée

Il appartenait aux races méridionales que la conquête ou les alliances ont insensiblement fondues dans l’empire russe. Il avait la beauté du profil, l’imposante largeur des yeux, l’épaisseur des lèvres, la force un peu exagérée des muscles, tempérée par l’élégance des formes modernes. La civilisation avait allégé la puissance du colosse. Ce qui en restait conservait quelque chose d’étrange et de saisissant qui attirait et fixait les regards, même après la surprise et l’attention accaparées d’abord par le tsar en personne.

Le cheval monté par ce jeune homme s’impatientait de la lenteur du défilé ; on eût dit que, ne comprenant rien à l’étiquette observée, il voulait s’élancer en vainqueur dans la cité domptée et fouler les vaincus sous son galop sauvage. Aussi son cavalier, craignant de lui voir rompre son rang et d’attirer sur lui un regard mécontent de ses supérieurs, le contenait-il avec un soin qui l’absorbait et ne lui permettait guère de se rendre compte de l’accueil morne, douloureux, parfois menaçant de la population.