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partira seule. Je garde Roger, je ne veux pas qu’il entende et qu’il voie ces aberrations.

— Monsieur le comte, vous êtes assez vengé, vous l’avez dit ! Ne recommencez pas ! Allez trouver madame et apprenez-lui tout. Elle se justifiera, j’en suis certain.

— Charles ! vous voulez me trahir, vous êtes tout à madame, vous n’êtes plus à moi. Il faut nous séparer, votre mission est accomplie, votre aisance assurée, adieu !

J’aurais dû accepter la rupture, je ne pus m’y résoudre. J’aimais les deux époux, j’aimais les deux enfants. Je n’avais plus d’autres affections sur la terre. J’étais déjà comme les vieux domestiques qui se sentent de la famille et n’en veulent point d’autre. Je refusai mon congé, je refusai ma fortune et ma liberté. Je promis d’obéir à mon maître et de ne plus me laisser attendrir.

Mais je crus devoir préserver madame d’une douleur nouvelle. J’allai la trouver et je lui parlai ainsi :

— M. le comte est fort affecté de la situation d’esprit de madame ; il craint que M. Roger n’en ressente le contre-coup et paraît décidé à faire partir madame sans son fils. Au nom de mon respect et de mon dévouement pour madame, je la supplie de renoncer à l’espoir de retrouver Gaston, afin d’éviter la douleur d’être séparée de Roger.