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Gaston par la main, et, sans attendre que cette femme, partagée entre le chagrin de le quitter et la joie de retrouver son fils, eût pu l’informer de rien, je l’emmenai dans un fiacre.

Je pris grand soin de l’amuser, de le distraire et de le faire reposer pendant deux jours dans un domicile improvisé que je m’étais assuré dans un faubourg ; après quoi, je pris la diligence, et le conduisis secrètement à Flamarande.

Puisque j’avais carte blanche, j’avais fait mon plan. Je m’étais attaché à cet enfant, je tenais à ce qu’il fût heureux ; pour rien au monde, je ne l’eusse confié à de simples mercenaires. Je n’avais jamais rencontré de famille plus unie et plus honnête que celle de Michelin. De plus, je ne voyais pas de localité plus propre que le hameau perdu de Flamarande à ensevelir un secret. C’était une impasse de la montagne, impraticable ou peu s’en faut pour des gens civilisés. Madame de Montesparre, depuis le départ de M. de Salcède, dénoûment douloureux de ses espérances, avait pris Montesparre en dégoût. Elle n’y allait plus et parlait de le vendre. M. de Salcède, s’il revenait de ses lointaines pérégrinations, n’avait plus de raisons pour aller explorer les environs de Flamarande ; mais, eût-il dû y retourner et madame de Montesparre dût-elle encore lui donner asile dans son château, quel risque pouvaient-ils faire courir au secret de mon maître après les précautions que je comptais prendre ?