Page:Sand - Dernieres pages.djvu/53

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

repartir quatre autres fois. La dernière fut la pire. J’étais couché, quand les gendarmes vinrent pour me prendre, je me cachai sous le lit. Ces gredins-là burent deux pichets de mon vin, tuèrent mes deux coqs et les mangèrent sous mon nez, en me jetant les os, car ils me savaient là et s’amusaient à mes dépens. Quand ils eurent bien déjeuné, ils firent semblant de s’en aller et je crus pouvoir aller dans ma cour m’assurer du dégât qu’ils m’avaient fait. Mais ils s’étaient cachés derrière la grange, et, tombant sur moi, ils m’attachèrent à la queue de leurs chevaux qui avaient mangé du vert. — Je vous laisse à penser ! Enfin, je reçus mon congé et je me croyais sauvé, quand on m’envoya deux médecins pour constater que j’étais trop malade pour servir. Je n’étais point malade du tout, et je me plaignais sans pouvoir dire où j’avais mal. Alors, ils m’ont signé un certificat bien drôle qui disait :

   « Nous avons trouvé M. Blaise
   De la légion nantaise,
   Assis sur sa chaise
   Fort mal à son aise,

» Parlant peu, maladroitement et sans raison. — En foi
de quoi, etc… »