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La nostalgie est pour beaucoup dans ce dégoût de l’avenir.

  « Vois ! c’est le Tage,
Ont dit les matelots,
  Un doux rivage
Enserre ses doux flots.
Ô fille de la lyre
Que ce beau lieu t’inspire. »
  — Hélas ! je dis :
« Je rêve à mon pays ! »

Pourtant, cette âme brisée se ranime :

Ah ! j’avais ce long mal que rien ne peut décrire,
Ce besoin incessant des lieux où l’on n’est pas.

Ce long mal de l’exil, indicible martyre,

Et cet ennui fatal, je le cachais à tous,
Et ma bouche mourante essayait de sourire,
Et nul ne me disait : « Vous souffrez, qu’avez-vous ? »
Hélas ! pas un ami ! Mais au Dieu qui console

Je contai ma douleur
Ma voix se ranima pour chanter la nature,

Et mon cœur pour bénir le Dieu de l’univers,
Et j’aime maintenant à laisser sur l’arène

La trace de mes pas
Terre des orangers, beau fleuve, et toi, Lisbonne,

Qu’il presse avec amour de ses flots azurés ;
De ces bords enchantés, gracieuse couronne,
Collines, sombres tours, temples, palais dorés,