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demander la tête d’Ordonio ? Mais, ici (elle se remet à genoux), je suis aux genoux d’un prince dont la main est ouverte à la justice, et le cœur à la clémence.

LE DUC, ému.

Cosima, vos paroles ont été au fond de ce cœur un peu jeune, un peu léger même, mais incapable d’outrager la faiblesse et d’avilir la beauté. Je ne me sens que trop porté à vous plaindre,… à vous admirer peut-être !… Cependant j’ai eu longtemps de l’affection et de l’estime pour Ordonio, et il m’est impossible de le condamner sur votre simple accusation. Il faut donc que je m’éclaire avant d’agir. — Levez-vous !

COSIMA.

Encore une fois, je ne me relèverai pas que Votre Altesse ne m’ait promis de prendre des mesures à l’instant même contre ce duel… Le duel, monseigneur ! Ils sont sortis ensemble pour se concerter… Ce soir peut-être… Ah ! qui sait !… Je n’ai pu courir, me jeter entre eux… Il m’a repoussée avec violence, il m’a enfermée ici…

LE DUC, la relevant

Ces portes s’ouvrent devant moi, et devant une personne dont Ordonio seul connaît le nom. Mais croyez bien qu’aucune considération ne m’empêchera de vous faire justice. — Allons ! La nuit est venue ; je vais vous reconduire chez vous.

COSIMA.

Moi, monseigneur ?

LE DUC.

Je ne souffrirai pas qu’une femme comme vous aille seule la nuit par les rues, quand je puis lui servir de cavalier. Ce manteau cache mon visage… Baissez votre voile, madame.

Il s’enveloppe, lui offre la main, et sort avec elle par le passage secret.