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ORDONIO.

Vous me le demandez ? Il sera ici dans un instant, et pour ne jamais vous quitter ; et moi, je ne vous reverrai plus peut-être !… et vous me reprochez d’être venu à la dérobée contempler une seule fois vos traits, effleurer vos mains de mes lèvres, comme si c’était trop de bonheur, après avoir tant souffert !

COSIMA.

Tant souffert ! vous avez donc souffert aussi, vous ?

ORDONIO.

J’étais loin de vous, je ne savais plus rien de vous ; je n’existais plus, et maintenant, s’il faut que je vous perde encore, j’aime mieux mourir !

COSIMA.

Ordonio ! ne vous découragez pas ainsi ; vivez ! vivez pour… pour sauver mon mari.

ORDONIO.

Je le sauverai, madame ; mais alors me traiterez-vous du moins comme un ami ?

COSIMA.

Comme un frère, si vous avez pitié de nos souffrances passées et si vous respectez désormais le repos de ma famille, l’honneur de ma maison…

ORDONIO.

Des craintes ! des reproches ! quand, moi, je me sacrifie, quand je travaille au salut d’Alvise avec autant d’ardeur que s’il s’agissait de mon bonheur et non de mon désespoir !

COSIMA.

Eh bien, non ! pas de reproches ; car vous êtes loyal, vous êtes noble, j’en suis sûre ; allez donc, et que Dieu…

ORDONIO.

Achevez, Cosima !

COSIMA.

Dieu m’a entendue. Allez, Ordonio.

Ordonio lui baise la main.