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DCCCXXXVII

À M. ALEXANDRE DUMAS FILS, À PARIS


Nohant, 21 décembre 1871.


Comprenez-vous, mon fils, que, depuis avant-hier soir, où nous avons lu votre pièce[1] reçue le matin, je n’ai pas eu une minute pour vous écrire ? et pourtant je mange vite et dors peu. Mais c’est comme cela dans certains moments de l’année. Enfin, avant que mes hôtes arrivent, je veux vous dire qu’elle est excellente, la pièce, excellente et superbe, pleine de vérité, de passion et de cœur. Cette femme colère et généreuse est une grande figure. « Elle est sensuelle, » a dit Sarcey ! et pourquoi ne le serait-elle pas ? mais elle est femme et loyale, elle le payera cher. Le mari recommencera, elle sera forcée de le haïr, de le mépriser et de le quitter, si elle a des enfants, parce qu’il les ruinerait et les perdrait. Mais qu’est-ce que cela fait à la pièce qui est un premier acte du drame de cette vie néfaste ? Pourquoi veut-on s’en aller content de tous les personnages et certain de leur heureux avenir ? Vous ne vous êtes pas engagé à montrer une aventure agréable, vous avez fait un drame poignant

  1. La Princesse Georges, représentée au théâtre du Gymnase, 2 décembre 1871.