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Journal d’un voyageur pendant le siège. Il est donc inutile que vous lisiez ce fatras qui n’a eu qu’un mérite, celui de prévoir assez bien les événements aujourd’hui accomplis.

Ce qui vaut mieux que mon mot, c’est votre lettre, qui le juge si bien et qui est par elle-même un chef-d’œuvre. Le meilleur article, le plus spontané, le plus juste, le mieux résumé serait cette lettre écrite au courant de la plume. Si vous voulez, je la publierai quand on recommencera à lire ; ce qui ne vous empêchera pas de faire une étude approfondie avant ou après, comme vous voudrez.

Je vous renvoie vos imprimés ; j’avais lu la lettre de votre sœur et je ne m’y étais pas trompée ; personne, que je sache n’a été dupe. Ce qui se passe à Paris ne me paraît pas du tout un symptôme social et humanitaire. Je ne sais quelle déduction en tireront les philosophes et les économistes. Je n’y vois qu’un fait tombant sous le coup de la critique de fait. Le résultat d’un excès de civilisation matérielle jetant son écume à la surface, un jour où la chaudière manquait de surveillants. La démocratie n’est ni plus haut, ni plus bas après cette crise de vomissements. C’est un vilain moment dans notre vie et dans notre histoire, et les souffrances de tant de gens, qui n’en peuvent mais, rendent bien triste. Ce sont les saturnales de la folie succédant à celles de l’Empire, et, après cela, les opinions se retrouveront en présence comme si de rien ne s’était passé !