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grands procès politiques, où tant de détails sont à contrôler, tant d’accusations à vérifier soi-même. Il y faudrait toute une vie exclusivement consacrée à l’enquête immense que l’avenir seul pourra mettre sous nos yeux. Vous êtes bien jeune pour ce travail d’exploration ! et ne craignez-vous pas de vous tromper ? Des appels à l’indignation publique contre telle ou telle figure historique n’ont-ils pas le danger de désaffectionner de l’œuvre commune ? Ils consternent un peu ma conscience, je vous le confesse, et je n’ose vous dire que vous faites bien de montrer les plaies de la Pologne avec cette absence de ménagement.

Je n’ose pas non plus vous dire que vous faites mal ; car vous obéissez à l’emportement d’une passion vraie, et, comme tout ce qui arrive doit servir à tout ce qui doit arriver, peut-être faut-il que vous accomplissiez la rude tâche que vous vous imposez. La vérité ne se fait qu’avec ce qui la provoque ; car, d’elle-même, elle est paresseuse à se montrer, et tant d’obstacles sont entre Dieu et nous !

Agréez, monsieur, l’expression de ma sollicitude quand même, et parce que.

GEORGE SAND.