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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

possible à oublier. Dans cette maison, dans ce jardin, je ne peux pas me persuader qu’elle ne va pas revenir un de ces jours. Je la vois partout, et cette illusion-là ramène des déchirements continuels. Dieu est bon quand même : il l’a reprise pour son bonheur, à elle, et nous nous reverrons tous ; un peu plus tôt, un peu plus tard.

On m’écrit que vous êtes toujours belle et ravissante dans Célia[1], je ne suis pas, en peine de cela.

Soyez heureuse, d’ailleurs, autant qu’on peut l’être quand en est comme vous dans le corps d’élite. On y reçoit plus de blessures que dans les autres régiments ; mais, quand un bonheur arrive, on le sent mieux, parce qu’on le comprend mieux que le vulgaire.

Bonsoir, chère fille ; dites toutes mes tendresses à qui de droit, et puis au criocère Cicéri[2] et au bon Charles-Edmond et à Croquignolet[3] quand vous le verrez. Viendrez-vous à Nohant cette année ? Tâchez, et aimez-nous. Je vous embrasse tendrement.

Votre second amoureux, puisque Cicéri est le premier dans les vétérans, vous baise humblement les sandales.

Émile est à Paris, et je lui ai dit d’aller, non pas vous embrasser de ma part, ça ne vous flatterait pas, mais savoir de vos nouvelles et tâcher de vous voir,

  1. De Comme il vous plaira.
  2. Cicéri, le peintre décorateur.
  3. Mathieu Plessy, frère de madame Arnould Plessy.