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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND


DXXX

À M. ALEXANDRE DUMAS FILS, À PARIS


Nohant, 14 juillet 1863, au soir.


Marc-Antoine Sand est né ce matin, anniversaire de la prise de la Bastille. Il est grand et fort, et il m’a regardée dans les yeux d’un air attentif et délibéré, quand je l’ai reçu tout chaud dans mon tablier. Je crois que nous nous connaissions déjà et il m’a eu l’air de vouloir dire : « Tiens ! c’est donc toi ? » On l’a fourré dans un bain de vin de Bordeaux, où il a gigoté avec une satisfaction marquée. Ce soir, il tette avec voracité, et sa nourrice, qui n’est autre que sa petite mère, est gaie comme un pinson. Nous avons tiré le petit canon et un pifferari d’Auvergne est venu lui faire entendre le plus primitif des chants gaulois. Le père Maurice a pleuré comme un veau et le père Calamatta comme une huître, à la vue de ce solide moutard ! Tout le monde est dans la joie : voilà ! Merci pour votre bonne lettre du 5 juillet ; réjouissez-vous avec nous, mon grand fils, et venez bientôt nous voir.

G. SAND.