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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

bœufs, éclairs et tonnerre, tout cela dans un mois, c’est à croire le bon Dieu fou. Et, dans le monde politique, il se fait aussi trente-six sortes de temps. Voilà notre drôle de corps d’empereur qui abandonne son petit pape mignon, qui serre l’Angleterre contre son cœur, et qui, après avoir convoqué l’Europe à déjeuner, lui fait entendre que la marmite est renversée et qu’elle peut rester chez elle. Tout cela ne me frappe pas d’admiration, bien que je m’en réjouisse ; mais il me semble que ce sont des solutions arrachées par le caprice, et qu’il y a, dans tout cet imprévu, trop de bizarrerie. Si c’est de la finasserie, ça ne vaut pas mieux. Du courage et de la franchise dès le commencement des querelles eussent peut-être évité la guerre. Un gouvernement qui a des principes et qui n’en change pas toutes les semaines n’a pas besoin de tant de sang et d’argent pour se faire respecter. C’est une politique de surprises qui fait le prestige de ce règne. C’est drôle, mais ça n’est pas si fort que ça en a l’air.

Au milieu de tout ça, je crains pour lui le poignard des jésuites, et je désirerais pourtant qu’il y eût de leur part une tentative (avortée) qui lui fît ouvrir les yeux tout à fait sur cette bonne petite Église, qu’il a tant cajolée et qui l’a toujours payé de sa haine.

Donne-moi quelquefois de vos nouvelles à tous, mon cher vieux.

J’ai fini ton roman dans l’Europe artiste, et je l’ai trouvé très amélioré comme style, et intéressant.