Page:Sand - Correspondance 1812-1876, 4.djvu/129

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
126
CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

elle était prêtresse et déesse. Dans la coulisse, elle quittait sa divinité, et cela ne l’empêchait pas d’être souvent bonne en tant que femme ; vous en avez eu la preuve, et vous faites bien de lui garder un bon souvenir.

Oui, je vous promets le Château des Étoiles[1](par parenthèse, il m’amuse beaucoup à griffonner ; est-ce bon signe ?), si ça peut vous être utile ; je le promets à vous, pas à d’autres. Si vous quittez, je ne reste pas. Mais vous savez que je serai obligée de vous demander de l’argent, tout l’argent peut-être, en vous livrant le manuscrit ; quelle que soit l’époque rapprochée où il sera prêt. Voyez si c’est possible ; car, pour moi, le contraire de ce possible serait l’impossible.

Je vis au jour le jour depuis vingt-cinq ans, et ça ne peut pas être autrement, et ça n’est pas ma faute ; si bien que je n’ai pas pu acheter un manteau et une robe d’hiver cette année, parce que l’accident de la Presse a dérangé mon ordre ; ordre très réel dans ce que les avares appellent mon désordre. Je sais me priver moi-même et de tout, même quelquefois du nécessaire ; mais je ne veux pas qu’un chat s’en ressente et s’en aperçoive autour de moi.

Ainsi voilà, entre nous : faites que l’on soit de parole ; on en a manqué pour Bois-Doré, et j’ai attendu un reliquat de compte qui m’aurait permis de me vêtir en raison de la froidure ; et surtout d’en vêtir d’autres

  1. Premier titre de l’Homme de neige.