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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

Bref, on se lance dans de grands ennuis et on s’expose à des tracasseries judiciaires fort désagréables.

Dans mon souvenir, les lettres de Béranger à vous sont aigres-douces pour moi. Celles qu’il m’a écrites sur vous sont méchantes pour vous. Il était méchant d’esprit et de langue, bien que le cœur fût noble et la conduite noble dans tout ce qui avait rapport à lui-même. Il savait donner et ne pas recevoir. C’était une grande science dans sa position ; mais il était bien flatteur et bien perfide là où il ne risquait rien, et il abusait souvent du respect religieux que l’on avait pour son génie, pour son âge et pour sa probité. Le pauvre Eugène Sue, mort si jeune, avait un bien autre cœur !

Vos vers sur sainte Solange sont très beaux et charmants. Mais vous travaillez dans la prose du gagne-pain avec douleur, je le vois. Non, pourtant : je vois aussi que vous êtes courageux et que vous sentez la consolation du devoir accompli. Que voulez-vous ! la vie est comme ça. Béranger n’avait pas de famille à nourrir et à contenter. Il a été heureux dans le repos. Il n’y faut point songer pour nous.

Bonsoir, chers enfants, et à vous de cœur.