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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND


CCCL

AU PRINCE LOUIS-NAPOLÉON BONAPARTE,
PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE


Paris, mars 1852.


Prince,

Ils sont partis pour le fort de Bicêtre, ces malheureux déportés de Châteauroux, partis enchaînés comme des galériens, au milieu des larmes d’une population qui vous aime et qu’on vous peint comme dangereuse et féroce. Personne ne comprend ces rigueurs. On vous dit que cela fait bon effet ; on vous ment, on vous trompe, on vous trahit !

Pourquoi, mon Dieu, vous abuse-t-on ainsi ? Tout le monde le devine et le sent, excepté vous. Ah ! si Henri V vous renvoie en exil ou en prison, souvenez-vous de quelqu’un qui vous aime toujours, bien que votre règne ait déchiré ses entrailles et qui, au lieu de désirer, comme les intérêts de son parti le voudraient peut-être, qu’on vous rende odieux par de telles mesures, s’indigne de voir le faux rôle qu’on veut vous faire dans l’histoire, à vous qui avez le cœur grand autant que la destinée.

À qui plaisent donc ces fureurs, cet oubli de la dignité humaine, cette haine politique qui détruit