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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

Mais tout homme de cœur, pour qui vous aurez été juste ou clément en dépit de la raison d’État, s’abstiendra de haïr votre nom et de calomnier vos sentiments. C’est de quoi je peux répondre à l’égard de ceux sur qui j’ai quelque influence. Eh bien, au nom de votre propre popularité, je vous implore encore pour l’amnistie ; ne croyez pas ceux qui ont intérêt à calomnier l’humanité, elle est corrompue, mais elle n’est pas endurcie. Si votre clémence fait quelques ingrats, elle vous fera mille fois plus de partisans sincères. Si elle est blâmée par des cœurs sans pitié, elle sera aimée et comprise par tout ce qui est honnête dans tous les partis.

Et, aujourd’hui, accordez-moi, prince, ce que deux fois vous m’avez fait sérieusement espérer. Ordonnez l’élargissement de tous mes compatriotes de l’Indre. Parmi ceux-là, j’ai plusieurs amis, mais que justice soit faite à tous ; puisque personne ne s’est déclaré contre vous, ce n’est que justice. Qu’on sache que ce que vous m’avez dit est vrai : « Je ne persécute pas la croyance, je ne châtie pas la pensée. »

Que cette parole, remportée dans mon cœur de l’Élysée et qui m’a presque guérie, reste en moi comme une consolation au milieu de mon effroi politique. Que les partis qui vous trahissent en feignant de vous servir ne nous disent plus : « Ce n’est pas notre faute, le pouvoir est implacable. » Que les intrigants qui se pressent dans l’ombre de votre drapeau ne nous fassent pas entendre qu’ils attendent des princes plus