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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

enfin elle marche, et, si on peut la retarder, on ne peut pas l’arrêter.

Si j’avais pu aller en Angleterre, j’aurais été à Doullens, au retour. Mais les jours que j’ai à passer à Paris sont comptés maintenant, et ce ne sera pas encore pour cette fois. Dites-moi toujours, en attendant que je puisse réaliser un des plus chers rêves que je fasse, comment il faut s’y prendre pour vous voir. À qui demander l’autorisation ? Et ne me la refusera-t-on pas ? Adressez-moi toujours vos lettres à Nohant par la même voie que la dernière. Vous savez que M. Lebarbier de Tinan est dans une bonne position. Je pense que sa femme doit être près de lui maintenant à Angoulême. Borie est toujours en Belgique, bien triste, comme nous tous. Si vous voulez que je vous parle de moi, je vous dirai que j’ai beaucoup travaillé pour le théâtre, cette année, mais que la révocation de Bocage me retardera indéfiniment. Je ne veux pas séparer mes projets de ceux d’un artiste démocrate, brave et généreux, qu’on ruine brutalement, parce qu’il a commis le crime d’envoyer des billets gratis à des ouvriers, d’avoir des employés et des acteurs républicains, d’être républicain lui-même, d’avoir fait jouer « la Marseillaise », etc. Tels sont les considérants de sa révocation. Nous reprendrons quand même nos projets de moralisation douce et honnête, pour lesquels le théâtre est un grand moyen d’expansion, et nous viendrons à bout de prêcher l’honneur et la bonté, en dépit de la censure et des commissions.