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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

réaction, n’est plus au nombre des moyens sur lesquels les révolutionnaires d’aucun parti puissent compter. Il reçoit en ce moment son coup de grâce entre les mains de nos adversaires ; Dieu soit loué, que ce soit entre les leurs et non entre les nôtres !

Vous disiez dans cette mansarde, je m’en souviens bien : « La terreur ! cela se supporterait maintenant un mois tout au plus, et, après, nous aurions peut-être vingt ans de monarchie. » Eh ! bien, nous pouvons aujourd’hui retourner la question. Cavaignac nous a fait une terreur militaire au point de vue de la République bourgeoise. Le socialisme s’est, pour ainsi dire, joint à la réaction royaliste et impérialiste pour le renverser. Cette réaction nous fait à son tour une petite terreur dans le goût de 1815. Le socialisme, la montagne, l’armée, le peuple, tout gronde contre elle, même les modérés, même une partie de la bourgeoisie. On n’attend plus que le réveil et le désabusement du paysan pour souffler sur cette force dérisoire. Et alors, si jusque-là nous avons le bonheur de résister aux provocations, si nous avons la force et la vertu de subir pour un temps les persécutions et la misère, nous n’aurons plus besoin de cette arme impuissante et dangereuse de la terreur.

Les Français jouissent depuis un quart de siècle d’une sorte de liberté constitutionnelle, qui est une hypocrisie, j’en conviens, si on songe à l’avenir, mais qui est du moins une réalité si on la compare au passé. Leurs mœurs se sont faites à cette liberté ; seulement,