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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

rais pas devoir vous exposer à des suspicions fâcheuses pour vous ; pour moi, qui vous cautionnerais moralement ; pour le comité, qui ne respecterait pas comme il convient la personne du rédacteur.

Enfin, nous voici avec nos systèmes et nos rêveries dans l’attente d’un dénouement réel, et je ne fais aucune autre démarche pour trouver un autre rédacteur. Voilà pourquoi je n’ose point insister, ni vous défendre, ni vous tourmenter ; car, si nous ne devons pas entrer en campagne sous le même drapeau, à quoi bon nous essayer à mêler nos nuances ? Vous avez beaucoup de richesses à perdre et je n’ai rien à vous donner. Mon fanatisme serait une arme dont vous vous serviriez peut-être mal pour combattre le mal, et je ne sais pas si votre calme pratique ne m’ôterait pas tout mon élan. Je vois bien que vous nous jugez un peu creux et un peu fous. C’est bien vite nous refuser la science sociale. Nous n’avons encore rien dit et rien formulé en fait de moyens.

Mais, de ce que nous n’acceptons pas certaines formules qui ne nous sont pas sympathiques, qui nous semblent manquer d’âme, de religion et de dévouement, il n’est pas dit que nous repoussions toute autre application que la doctrine de Fourier. C’est parce qu’elle n’applique nullement nos principes, quoi que vous en disiez, que nous ne l’aimons pas et que nous ne la voulons pas. Vous conciliez ces principes et les nôtres avec beaucoup d’art et de talent. Mais, à votre insu, c’est une conciliation spécieuse ;