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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

J’ai, par un coup du sort, trouvé à acheter un mobilier propre, charmant pour le pays, mais dont un paysan de chez nous ne voudrait pas. Il a fallu se donner des peines inouïes pour avoir un poêle, du bois, du linge, que sais-je ? depuis un mois, que je me crois installée, je suis toujours à la veille de l’être. Ici, une charrette met cinq heures pour faire trois lieues ; jugez du reste ! Il faut deux mois pour confectionner une paire de pincettes. Il n’y a pas d’exagération dans ce que je vous dis. Devinez, sur ce pays, tout ce que je ne vous dis pas ! Moi, je m’en moque ; mais j’en ai un peu souffert, dans la crainte de voir mes enfants en souffrir beaucoup.

Heureusement mon ambulance va bien. Demain, nous partons pour la chartreuse de Valdemosa, la plus poétique résidence de la terre. Nous y passerons l’hiver, qui commence à peine et qui va bientôt finir. Voilà le seul bonheur de cette contrée. Je n’ai de ma vie rencontré une nature aussi délicieuse que celle de Mayorque.

Dites à Valdemosa que je n’ai pas pu voir beaucoup sa famille, car j’ai passé tout le temps à la campagne ; mais, depuis cinq ou six jours, je suis revenue à Palma, où j’ai revu sa mère, sa sœur et son beau-frère. Ils sont charmants pour nous. Son beau-frère est très bien et plus distingué que le pays ne le comporte. Sa sœur est très gentille et chante à ravir. Dites aussi à M. Remisa que je le remercie beaucoup de m’avoir recommandée à M. Nunez, homme excellent, tout à fait sim-