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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

porte ce matin, pour avoir mené Maurice (à peine sorti de son lit à la suite de cette affreuse indigestion) dans le village, se bourrer de pain chaud et de vin du cru.

J’ai confié Solange aux soins de la femme d’André, que j’ai depuis deux ans. Je vous envoie le portrait de Maurice, que j’ai essayé le soir même où il est tombé malade. Je n’ose pas vous dire qu’il ressemble beaucoup ; j’ai eu peu de temps pour le regarder, parce qu’il s’endormait sur sa chaise. Je croyais seulement au besoin de sommeil après avoir joué, tandis que c’était le mal de tête et la fièvre qui s’emparaient de lui. Depuis, je n’ai pas osé le faire poser, dans la crainte de le fatiguer.

J’ai cherché autant que possible, en retouchant mon ébauche, de me pénétrer de sa physionomie espiègle et décidée. Je crois que l’expression y est bien ; seulement le portrait le peint plus âgé d’un an ou deux. La distance des narines à l’œil est un peu exagérée, et la bouche n’est pas assez froncée dans le genre de la mienne. En vous représentant les traits de cette figure un peu plus rapprochés, de très longs cils que le dessin ne peut pas bien rendre et qui donnent au regard beaucoup d’agrément, de très vives couleurs roses avec un teint demi-brun, demi-clair, les prunelles d’un noir orangé, c’est-à-dire d’un moins beau noir que les vôtres, mais presque aussi grandes ; enfin, en faisant un effort d’imagination, vous pourrez prendre