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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

à mettre la patte à la plume, pour réfuter les imputations calomnieuses qu’il vous a plu de présenter à mon honorée protectrice et amie, dame Aurore, que j’ai fidèlement accompagnée et gardée jusqu’à ce jour ; à cette fin de détruire la bonne intelligence qui a toujours régné entre elle et moi, et de lui inspirer des doutes sur mes principes politiques.

Il me serait facile de mettre au jour des faits qui couvriraient de gloire l’espèce des chiens, au grand détriment de celle des hommes. Il me serait facile encore de vous montrer deux rangées de dents, auprès desquelles les vôtres ne brilleraient guère, et de vous prouver que, quand on veut mordre et déchirer, il n’est pas prudent de s’adresser à plus fort que soi.

Mais je laisse ces moyens aux esprits rudes et grossiers qui n’en ont point d’autres. Je dédaigne des adversaires dont la défaite ne me rapporterait point de gloire, et dont je viendrais aussi facilement à bout que des chats que je surprends à vagabonder la nuit autour du poulailler, au lieu d’être à leur poste à l’armée d’observation contre les souris et les rats.

Je ne veux employer avec vous que les armes du raisonnement. Mon caractère paisible préfère terminer à l’amiable les discussions où la rigueur n’est pas absolument nécessaire. Accoutumé dès l’enfance et, pour me servir de l’expression de M. Fleury, dès mon bas âge, à des études graves et utiles, j’ai contracté le goût des méditations profondes. J’ai réussi à l’in-