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CORRESPONDANCE DE GEORGE SAND

peu de chose contre la masse, qu’elle se tient prudemment en repos. Nous n’avons qu’un danger à courir, celui d’être assaillis par un régiment détaché de Bourges pour nous soumettre. Alors on se battra.

Les deux hommes d’ici sont des plus décidés. Casimir est nommé lieutenant de la garde nationale, et cent vingt hommes sont déjà inscrits. Nous attendons avec impatience la direction que nous donnera le gouvernement provisoire. J’ai peur, mais je n’en dis rien ; car ce n’est pas pour moi que j’ai peur. En attendant, on se réunit, on s’excite mutuellement.

Et vous, que ferez-vous ? La famille Bertrand viendra-t-elle ici bientôt ? L’accompagnez-vous toujours ? Je désire bien vous revoir.

Parlez-moi de notre député ; est-il arrivé sans événement ? Nous l’avons vu partir au plus rude moment et nous frémissions de ce qui pouvait lui arriver. Nous espérons maintenant qu’il a pu entrer sans danger, mais nous sommes impatients d’en avoir la certitude. Tâchez de le voir, et priez-le, s’il a un instant de loisir, de me donner de ses nouvelles. Il est notre héros, et, comme notre attachement est son unique salaire, il ne peut pas refuser celui-là.

Adieu, mon cher enfant. Où sont nos paisibles lectures et nos jours de repos ? Quand reviendront-ils ? La guerre n’est pas mon élément ; mais, pour vivre ici-bas, il faut être amphibie. S’il ne fallait que mon sang et mon bien pour servir la liberté ! Je ne puis pas consentir à voir verser celui des autres, et nous