Page:Sand - Contes d une grand mere 1.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pressée de te marier, auquel cas le docteur fera l’avance.

— Ah ! ne parlons pas de moi, s’écria Diane, je n’ai jamais pensé au mariage et je ne m’occupe pas de ce qui me concerne dans l’avenir. Parlons de toi seul ; est-ce que cette jolie maison de ville que tu aimes tant, que tu as si bien arrangée, où tu es si bien installé, va être vendue ? Non, c’est impossible, où travailleras-tu ! Et ta maison de campagne… Où demeureras-tu donc ?

Flochardet, voyant que Diane s’affectait pour lui plus qu’il n’eût voulu, s’efforça de la rassurer en lui disant que peut-être obtiendrait-il de nouveaux délais. Mais elle s’inquiétait de l’excès de travail qu’il allait s’imposer. Elle craignait qu’il ne tombât malade. Elle feignit de se tranquilliser, mais ce fut pour lui faire plaisir, et elle rentra tout abattue et passa la soirée à pleurer en dedans. Elle n’osait pas dire au docteur combien elle avait de chagrin, elle craignait de lui entendre blâmer et critiquer son père. Elle joua aux échecs avec son vieux ami et se retira dans sa chambre pour pleurer en liberté.

Elle dormit peu et ne rêva point. Le matin, elle se remit au travail comme les autres jours, cherchant à se distraire, mais revenant toujours à cette pensée cruelle que madame Laure ferait mourir son père à force de travail, et que si sa pauvre mère, à elle, eût vécu, Flochardet eût toujours été sage et heureux.

Alors elle pleurait sa mère dans son cœur, non plus comme la première fois, alors qu’en la re-