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et large, noble malgré cela. Mais je t’en dis trop, tu ne comprends pas encore.

— Dites toujours, mon bon ami. Je comprendrai peut-être !

— Ça ne te fatigue pas de faire attention ?

— Au contraire, ça me repose.

— Eh bien, sache que les artistes grecs avaient le sentiment du grand et qu’ils le mettaient dans les plus petites choses. Tu ne te souviens pas d’avoir vu ma petite collection de statuettes ?

— Si fait, je m’en souviens très-bien, ainsi que des collections plus belles qui sont dans la ville ; mais personne ne m’a jamais rien expliqué.

— Tu viendras passer une matinée chez moi et je te ferai comprendre comment, avec les moyens les plus simples et des formes à peine indiquées, ces artistes-là faisaient toujours grand et beau. Tu verras aussi des bustes romains d’une époque plus récente. Grands artistes aussi, les Romains ! moins nobles, moins purs que les Grecs, mais toujours vrais, et sentant la vie dans ce qui est vraiment la vie.

— Je ne comprends plus ! dit Diane en soupirant, et je voudrais tant savoir ce que vous appelez la vie !

— C’est très-facile. Ta robe, ton soulier, ton peigne, sont-ce là des choses vivantes ?

— Oh ! mais non !

— Mon regard, mon sourire, cette grosse ride à mon front, sont-ce des choses mortes ?

— Certainement non !

— Eh bien, quand tu vois un personnage de tableau ou de statue dont la figure ne vit pas, sois sûre