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Tout cela se passa comme dans un rêve ; mais dans ce moment-là, malgré toute l’instruction qu’il avait acquise, personne n’eût pu persuader à Clopinet que les bons génies qui l’avaient assisté autrefois ne s’en étaient point mêlés encore cette fois-ci. Il se releva vite en leur criant : — Merci, merci, mes bien-aimés ! — Il retourna le tailleur sur le ventre et le tint couché, la tête en bas, pour lui faire rendre l’eau qu’il avait bue ; il le frotta de toute sa force jusqu’à ce qu’il vit qu’il retrouvait la respiration. Au bout de cinq minutes, Tire-à-gauche revint tout à fait à lui, et, voulant parler, fit de grands cris par suite du dernier étouffement qu’il avait à combattre. Il voulait se rejeter à l’eau pour gagner plus vite la terre ; il était comme fou. Clopinet réussit à le maintenir en le battant ferme du plat de la main, ce qui acheva de le ranimer.

— Ayez confiance, lui dit Clopinet quand il put lui faire comprendre quelque chose ; dans un instant, cette roche sera toute découverte, et nous retournerons à pied sec à la côte. J’ai réussi à vous réchauffer un peu ; si vous vous refroidissez à présent, vous mourrez.

Tire-à-gauche se soumit, et au bout d’un quart d’heure il était sur le rivage et se séchait à fond, tout en mangeant le pain de Clopinet devant un bon feu d’herbes sèches que ce brave enfant avait allumé sur un ressaut de la dune où la marée ne montait pas.

C’est alors que le tailleur put raconter à Clopinet comment, malgré son horreur pour la mer, il s’était